En 2030, après une catastrophe climatique, Jim, un jeune garçon, vit avec ses parents adoptifs, Trelaway et Sally-Sea. Sa vie est bouleversée le jour où un inconnu étrange, Billy Bones, arrive sous une pluie battante dans l’hôtel qu’ils tiennent. Des hommes sont à ses trousses, et il finira par mourir en cédant à Jim un téléphone portable contenant des données permettant d’accéder au trésor du légendaire Flint…

Vous avez bien entendu reconnu la trame du célébrissime roman de Stevenson, L’Île au Trésor. L’histoire, revisitée par Pierre Pelot, ne change que par son décor…

J’avoue avoir été un peu déçu à la lecture de ce roman. Pelot reprend absolument tous les personnages et toutes les péripéties du roman de Stevenson, à quelques changements près (la mère de Jim est remplacée par Sally-Sea, la sœur jumelle de sa mère disparue ; le docteur Livesey ne fait plus partie de l’expédition ; Trelawney (« Trelaway ») est le compagnon de la mère (adoptive) de Jim). Or, ces changements n’apportent rien à l’histoire. Pire : ils laissent présager des rebondissements inédits qui ne viennent jamais. En effet, pourquoi incorporer des allusions incessantes à la mère naturelle de Jim, que tout le monde semble avoir vue, si celle-ci n’a en réalité aucun réel rôle dans l’histoire ? Ce qui est décevant, c’est d’avoir pris des libertés anodines avec le roman originel, alors que je m’attendais à des surprises scénaristiques bien plus importantes au fur et à mesure de la lecture.

De plus, sur un plan symbolique, le couple Trelaway-Sally ne fonctionne pas. En effet, L’Île au Trésor, c’est pour moi avant tout le récit du passage à l’âge adulte d’un enfant, et de sa relation avec Silver, père de substitut. Ici, comme Jim embarque avec son père et sa mère d’adoption, le récit perd de sa force : Jim ne peut devenir adulte, car il ne coupe pas le cordon qui le relie à sa famille. De plus, son père et sa mère biologiques ont disparu avant ses trois ans, on n’assiste donc pas comme dans le roman original à la mort du père et au départ du giron de sa mère…
Le personnage de Sally-Sea, en outre, n’a aucun rôle dans le récit, à part celui d’un deus ex-machina final. Elle n’est en fait que l’ombre de sa sœur, tout au long du récit. Dommage…

Le style de Pelot est en réalité ce qui constitue le réel intérêt du livre, dont l’histoire archi-connue ne subit aucun changement majeur. L’auteur a réussi à créer un narrateur intéressant, au langage contemporain ; lire ses aventures est donc prenant, de par la recréation langagière d’un jeune homme de 2030. De fait, la lecture du roman, malgré sa trame connue, est très plaisante.

À qui s’adresse donc cette réécriture ? Probablement pas à ceux qui ont déjà lu l’original (à moins de ne lire le livre que pour l’exercice de style), car la trame est strictement identique au roman de Stevenson et ne réserve aucune surprise. Alors s’adresse-t-il à ceux qui n’ont pas lu l’original ? Peut-être… Mais le récit de Stevenson possède à mon sens plus de résonnances symboliques, comme je l’ai indiqué plus haut…

Pierre Pelot signe donc ici un livre intéressant, ne serait-ce que par son style, mais à mon avis un livre moins fort que l’original et destiné à un public incertain. La version animée de Disney était plus audacieuse dans le même genre (transposer dans le futur l’intrigue du roman), mais le livre de Pelot reste intéressant pour son narrateur et pour le défi langagier relevé par l’auteur.

3 sur 5

L'Île au Trésor (Pierre Pelot)